Language of document : ECLI:EU:T:2016:18

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

19 janvier 2016 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché des projets relatifs à des appareillages de commutation à isolation gazeuse – Décision prise à la suite de l’annulation partielle de la décision initiale par le Tribunal – Amendes – Droits de la défense – Obligation de motivation – Égalité de traitement – Montant de départ – Degré de contribution à l’infraction »

Dans l’affaire T‑404/12,

Toshiba Corp., établie à Tokyo (Japon), représentée par Mme J. MacLennan, solicitor, Mes A. Schulz et S. Sakellariou, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. N. Khan et F. Ronkes Agerbeek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision C (2012) 4381 de la Commission, du 27 juin 2012, modifiant la décision C (2006) 6762 final, du 24 janvier 2007, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] (devenu article 101 TFUE) et de l’article 53 de l’accord EEE dans la mesure où Mitsubishi Electric Corp. et Toshiba Corp. en étaient destinataires (affaire COMP/39.966 – Appareillages de commutation à isolation gazeuse – Amendes), et, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant de l’amende imposée à la requérante,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová (rapporteur) et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. L. Grzegorczyk, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 avril 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Toshiba Corp., est une société japonaise active dans différents secteurs et, notamment, dans le domaine des appareillages de commutation à isolation gazeuse (ci‑après les « AIG »). Entre octobre 2002 et avril 2005, son activité en matière d’AIG était exercée par une société commune, à savoir TM T&D Corp., détenue à parts égales avec Mitsubishi Electric Corp. (ci‑après « Melco ») et dissoute en 2005.

2        Le 24 janvier 2007, la Commission des Communautés européennes a adopté la décision C (2006) 6762 final relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/F/38.899 – Appareillages de commutation à isolation gazeuse) (ci‑après la « décision de 2007 »).

3        Dans la décision de 2007, la Commission a constaté qu’une infraction unique et continue à l’article 81 CE et à l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen avait existé sur le marché des AIG de l’Espace économique européen (EEE) entre le 15 avril 1988 et le 11 mai 2004 et a imposé aux destinataires de ladite décision, qui étaient des producteurs européens et japonais d’AIG, des amendes dont le montant avait été calculé en application de la méthodologie exposée dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 17 et de l’article 65, paragraphe 5, du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3, ci‑après les « lignes directrices pour le calcul des amendes ») ainsi que dans la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3).

4        L’infraction visée par la décision de 2007 comportait trois éléments essentiels :

–        un accord signé à Vienne le 15 avril 1988 (ci‑après l’« accord GQ ») ayant pour objet l’attribution des projets relatifs à des AIG à l’échelle mondiale selon des règles convenues, afin de maintenir les quotas reflétant dans une large mesure les « parts de marché historiques estimées » ; l’accord, qui était applicable au monde entier, à l’exception des États‑Unis, du Canada, du Japon et de 17 pays d’Europe occidentale, reposait sur l’attribution d’un « quota conjoint japonais » aux producteurs japonais et d’un « quota conjoint européen » aux producteurs européens ;

–        un arrangement parallèle (ci‑après l’« arrangement commun ») en vertu duquel, d’une part, les projets relatifs à des AIG situés au Japon et dans les pays des membres européens de l’entente étaient réservés, respectivement, aux membres japonais et aux membres européens du cartel et, d’autre part, les projets relatifs à des AIG situés dans les autres pays européens étaient également réservés au groupe européen, les producteurs japonais s’étant engagés à ne pas présenter d’offres pour les projets situés en Europe ; toutefois, en échange de cet engagement, de tels projets devaient être notifiés au groupe japonais et imputés sur le « quota conjoint européen » prévu par l’accord GQ ;

–        un accord signé à Vienne le 15 avril 1988 et intitulé « E‑Group Operation Agreement for GQ‑Agreement » (ci‑après l’« accord EQ »), signé par les membres du groupe européen des producteurs et ayant pour objet le partage des projets relatifs à des AIG attribués audit groupe en vertu de l’accord GQ.

5        À l’article 1er de la décision de 2007, la Commission a constaté que la requérante avait participé à l’infraction pour la période allant du 15 avril 1988 au 11 mai 2004.

6        Pour l’infraction visée à l’article 1er de la décision de 2007, la requérante s’est vu infliger, à l’article 2 de la décision de 2007, une amende d’un montant de 90 900 000 euros, dont 4 650 000 euros, correspondant à l’infraction commise par TM T&D, à payer solidairement avec Melco.

7        Le 18 avril 2007, la requérante a introduit un recours contre la décision de 2007.

8        Par arrêt du 12 juillet 2011, Toshiba/Commission (T‑113/07, Rec, EU:T:2011:343), d’une part, le Tribunal a rejeté le recours de la requérante pour autant qu’il visait à l’annulation de l’article 1er de la décision de 2007. D’autre part, il a annulé l’article 2, sous h) et i), de la décision de 2007, pour autant qu’il concernait la requérante, motif pris de ce que la Commission avait violé le principe d’égalité de traitement en choisissant, dans le cadre du calcul du montant de l’amende, une année de référence pour la requérante qui était différente de celle choisie pour les participants européens à l’infraction.

9        Le 23 septembre 2011, la requérante a formé un pourvoi devant la Cour contre l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343).

10      Le 15 février 2012, la Commission a envoyé à la requérante une lettre de faits qui indiquait qu’elle entendait adopter une nouvelle décision lui imposant une amende (ci‑après la « lettre de faits »). La Commission a exposé les faits qui étaient, selon elle, pertinents pour le calcul du montant de cette amende, compte tenu de l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343).

11      Les 7 et 23 mars 2012, la requérante a présenté ses observations sur la lettre de faits.

12      Le 12 juin 2012, une réunion s’est tenue entre les représentants de la requérante et l’équipe de la Commission chargée de l’affaire.

13      Par décision C (2012) 4381 de la Commission, du 27 juin 2012, modifiant la décision de 2007 dans la mesure où Melco et la requérante en étaient destinataires (affaire COMP/39.966 – Appareillages de commutation à isolation gazeuse – Amendes) (ci‑après la « décision attaquée »), l’article 2 de la décision de 2007 a été modifié par l’ajout de nouveaux points sous h) et i). Sous h), la requérante s’est vu infliger une amende d’un montant de 4 650 000 euros, à payer solidairement avec Melco. Sous i), la requérante s’est vu infliger une amende d’un montant de 56 793 000 euros en tant que seule responsable.

14      Afin de remédier à l’inégalité de traitement critiquée par le Tribunal dans l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), la Commission s’est fondée, dans la décision attaquée, sur les chiffres d’affaires d’AIG globaux pour 2003. Dans la mesure où, pendant cette année, les activités en matière d’AIG de la requérante et de Melco étaient exercées par TM T&D, la Commission a pris en considération son chiffre d’affaires pour 2003 (considérants 59 et 60 de la décision attaquée).

15      Ainsi, premièrement, dans le cadre du traitement différencié visant à refléter les contributions respectives des différents participants à l’entente, la Commission a calculé la part de marché de TM T&D en 2003 en ce qui concerne les AIG (15 à 20 %) et l’a classée dans la deuxième catégorie selon la catégorisation établie aux considérants 482 à 488 de la décision de 2007. Par conséquent, un montant hypothétique de départ de 31 000 000 euros a été attribué à TM T&D (considérant 61 de la décision attaquée).

16      Deuxièmement, afin de refléter la capacité inégale de la requérante et de Melco à contribuer à l’infraction pour la période ayant précédé la création de TM T&D, le montant de départ de cette dernière a été divisé parmi ses actionnaires en proportion de leurs ventes respectives d’AIG en 2001, dernière année entière ayant précédé la création de TM T&D. Par conséquent, la requérante s’est vu attribuer un montant de départ de 10 863 199 euros et Melco un montant de départ de 20 136 801 euros (considérants 62 et 63 de la décision attaquée).

17      Troisièmement, afin d’assurer un effet dissuasif à l’amende, la Commission a appliqué un coefficient de dissuasion de 2 à la requérante, sur le fondement de son chiffre d’affaires pour 2005 (considérants 69 à 71 de la décision attaquée).

18      Quatrièmement, afin de refléter la durée de l’infraction pendant la période ayant précédé la création de TM T&D, le montant de départ de la requérante a été augmenté de 140 % (considérants 73 à 76 de la décision attaquée).

19      Cinquièmement, afin de refléter la durée de l’infraction pendant la période d’activité de TM T&D, la requérante et Melco se sont vu infliger, solidairement, un montant correspondant à 15 % du montant hypothétique de départ de TM T&D (considérant 77 de la décision attaquée).

20      Enfin, sixièmement, le montant de l’amende solidaire a été multiplié par le coefficient de dissuasion de la requérante et le montant résultant de cette multiplication excédant le montant de l’amende solidaire lui a été infligé à titre individuel (considérant 78 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

21      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 septembre 2012, la requérante a introduit le présent recours.

22      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 2 mai 2013, la procédure a été suspendue jusqu’au prononcé de l’arrêt dans l’affaire C‑498/11 P, Toshiba Corp./Commission.

23      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la première chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

24      Par arrêt du 19 décembre 2013, Siemens/Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, EU:C:2013:866), la Cour a rejeté le pourvoi introduit par la requérante contre l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343). La procédure dans la présente affaire a, dès lors, été reprise.

25      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé, le 3 février 2015, d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, a invité les parties à déposer un document et leur a posé par écrit des questions. Les parties ont déféré aux demandes du Tribunal.

26      Par lettre du 15 avril 2015, versée au dossier, la requérante a présenté ses observations sur les réponses de la Commission aux questions posées par le Tribunal. En annexe à cette lettre, elle a communiqué au Tribunal un résumé préparé par ses avocats à l’issue de la réunion du 12 juin 2012.

27      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 21 avril 2015.

28      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, réduire le montant de l’amende ;

–        condamner la Commission aux dépens, y compris aux frais relatifs à la garantie bancaire.

29      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement dépourvu de tout fondement en droit ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la demande principale, tendant à l’annulation de la décision attaquée

30      Dans sa requête, la requérante invoque cinq moyens au soutien de sa demande principale. Le premier moyen est tiré d’une violation des principes de bonne administration et de proportionnalité. Le deuxième moyen est tiré d’une violation de ses droits de la défense. Le troisième moyen est tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne le montant de départ de l’amende. Le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation. Le cinquième moyen est tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne la détermination du niveau de responsabilité de la requérante par rapport aux participants européens à l’infraction.

31      En réponse à la question écrite du Tribunal, la requérante a déclaré que, à la suite du prononcé de l’arrêt Siemens/Commission, point 24 supra (EU:C:2013:866), elle se désistait de son premier moyen. Par conséquent, il y a seulement lieu d’examiner les deuxième à cinquième moyens. À cet égard, le Tribunal estime opportun d’examiner les moyens visant la procédure ayant abouti à l’adoption de la décision attaquée et la motivation de cette dernière, à savoir les deuxième et quatrième moyens, avant d’aborder les troisième et cinquième moyens, qui concernent le bien‑fondé du calcul du montant de l’amende opéré dans ladite décision.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense de la requérante

32      La requérante soutient que la Commission a violé ses droits de la défense dans la mesure où, d’une part, elle n’a pas envoyé une nouvelle communication des griefs avant l’adoption de la décision attaquée et, d’autre part, elle n’a pas traité dans la lettre de faits tous les éléments importants du calcul du montant de l’amende infligée.

33      La Commission conteste le bien‑fondé des arguments de la requérante.

–       Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de l’absence de nouvelle communication des griefs

34      Par la première branche du deuxième moyen, la requérante soutient que, plutôt que de lui adresser une simple lettre de faits, la Commission aurait dû lui envoyer une nouvelle communication des griefs avant l’adoption de la décision attaquée.

35      La requérante rappelle, à cet égard, que la communication des griefs constitue une « sauvegarde procédurale essentielle » garantissant le droit à être entendu du destinataire de la décision de la Commission et soutient qu’une lettre de faits n’apporte pas les mêmes garanties, notamment en ce qu’elle ne permet pas de demander une audience devant le conseiller‑auditeur indépendant de l’équipe chargée du dossier.

36      À cet égard, selon la requérante, la Commission soutient à tort qu’une communication des griefs est seulement nécessaire lorsque de nouveaux griefs sont invoqués. En effet, selon la jurisprudence, une communication des griefs serait exigée afin de permettre à l’entreprise concernée de se défendre non seulement contre la constatation d’une violation, mais également contre l’imposition d’une nouvelle amende. Cette conclusion serait confirmée par la communication de la Commission concernant les bonnes pratiques relatives aux procédures d’application des articles 101 [TFUE] et 102 [TFUE] (JO 2011, C 308, p. 6, ci‑après la « communication concernant les bonnes pratiques »), ainsi que par des déclarations du membre de la Commission chargé de la concurrence. De même, l’adoption d’une nouvelle communication des griefs correspondrait à la pratique décisionnelle de la Commission dans les affaires comparables à la présente affaire où une décision avait été annulée par le juge de l’Union européenne.

37      La requérante ajoute que, selon la jurisprudence, la procédure suivie en vue de remplacer une procédure annulée doit, en principe, être reprise au point précis auquel l’illégalité est intervenue. En l’espèce, l’erreur ayant justifié l’annulation de la décision de 2007 serait une erreur de droit matériel qui aurait inévitablement affecté la validité des mesures préparatoires de cette décision, ce qui impliquerait qu’une nouvelle communication des griefs aurait été nécessaire.

38      La Commission estime que, dans la mesure où elle n’a pas retenu de nouveaux éléments à l’encontre de la requérante, une nouvelle communication des griefs n’était pas nécessaire en l’espèce.

39      Selon la jurisprudence, la communication des griefs doit contenir un exposé des griefs libellé dans des termes suffisamment clairs, fussent‑ils sommaires, pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés par la Commission. Ce n’est, en effet, qu’à cette condition que la communication des griefs peut remplir la fonction qui lui est attribuée par les règlements de l’Union et qui consiste à fournir tous les éléments nécessaires aux entreprises pour qu’elles puissent faire valoir utilement leur défense avant que la Commission n’adopte une décision définitive (voir arrêt du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, Rec, EU:T:2006:74, point 46 et jurisprudence citée).

40      S’agissant de l’exercice des droits de la défense à l’égard de l’imposition d’amendes, il ressort d’une jurisprudence constante que, dès lors que la Commission indique expressément, dans la communication des griefs, qu’elle va examiner s’il convient d’infliger des amendes aux entreprises concernées et qu’elle énonce les principaux éléments de fait et de droit susceptibles d’entraîner une amende, tels que la gravité et la durée de l’infraction supposée et le fait d’avoir commis celle‑ci « de propos délibéré ou par négligence », elle remplit son obligation de respecter le droit des entreprises à être entendues. Ce faisant, elle leur donne les éléments nécessaires pour se défendre non seulement contre une constatation de l’infraction, mais également contre le fait de se voir infliger une amende (voir arrêt BASF/Commission, point 39 supra, EU:T:2006:74, point 48 et jurisprudence citée).

41      Dans ce contexte, la Commission n’est pas obligée, dès lors qu’elle a indiqué les éléments de fait et de droit sur lesquels elle fondera son calcul du montant des amendes, de préciser la manière dont elle se servira de chacun de ces éléments pour la détermination du montant de l’amende. Donner des indications concernant le montant des amendes envisagées, aussi longtemps que les entreprises n’ont pas été mises en mesure de faire valoir leurs observations sur les griefs retenus contre elles, reviendrait à anticiper de façon inappropriée la décision de la Commission (voir arrêt BASF/Commission, point 39 supra, EU:T:2006:74, point 62 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, il n’est pas contesté que l’adoption de la décision de 2007 a été précédée par l’envoi, le 20 avril 2006, d’une communication des griefs à la requérante (ci‑après la « communication des griefs de 2006 »). Compte tenu de ce que la décision attaquée prévoit explicitement qu’elle constitue une décision modificative de la décision de 2007, la procédure de son adoption s’inscrit dans le prolongement de la procédure ayant abouti à la décision de 2007. Dans ces circonstances, le contenu de la communication des griefs de 2006 peut être pris en considération pour vérifier le respect des droits de la défense de la requérante dans la procédure ayant abouti à l’adoption de la décision attaquée, pour autant qu’il n’est pas remis en cause par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343).

43      À cet égard, sous le point 9.2 de la communication des griefs de 2006, la Commission a annoncé expressément qu’elle entendait imposer des amendes aux destinataires dudit document (considérant 408) et a précisé les facteurs essentiels pour la détermination du montant de ces amendes (considérants 409 à 416), dont notamment la gravité de l’infraction, sa nature délibérée et durable, le caractère secret et institutionnalisé de l’entente, sa dimension géographique, le poids relatif de l’infraction commise par les différentes entreprises, en particulier en ce qui concerne la durée de leur participation et leur importance sur le marché des AIG, et la volonté d’assurer un effet dissuasif des amendes.

44      Ainsi, contrairement à ce que la requérante a soutenu lors de l’audience, la communication des griefs de 2006 remplit les exigences posées par la jurisprudence citée au point 40 ci‑dessus en ce qui concerne le respect des droits de la défense.

45      En outre, si l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), a annulé la décision de 2007 pour autant qu’une amende avait été imposée à la requérante, il n’a pas mis en cause la véracité, la pertinence ou le bien‑fondé des éléments de droit et de fait relatifs au calcul du montant de l’amende exposés dans la communication des griefs de 2006 et résumés au point 43 ci‑dessus.

46      En particulier, le Tribunal n’a critiqué ni la volonté de la Commission d’assurer un effet dissuasif des amendes, ni son choix de refléter le poids relatif de l’infraction commise par les différentes entreprises en ce qui concerne leur importance sur le marché des AIG, dès lors qu’il s’est borné à relever que, dans les circonstances de l’espèce, il n’était pas justifié de fonder ce dernier exercice sur différentes années de référence pour différentes entreprises.

47      Par conséquent, les constats opérés dans l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), ne s’opposent pas à la prise en considération des indications fournies dans la communication des griefs de 2006 au sujet de la détermination du montant de l’amende lors du contrôle du respect des droits de la défense de la requérante dans le cadre de la procédure ayant abouti à la décision attaquée.

48      Les autres arguments invoqués par la requérante au soutien de la première branche du deuxième moyen ne sauraient remettre en cause cette conclusion.

49      Ainsi, la requérante invoque la jurisprudence selon laquelle une communication des griefs est exigée afin de permettre à l’entreprise concernée de se défendre non seulement contre la constatation d’une violation, mais également contre l’imposition d’une amende qui n’a pas été mentionnée dans la communication des griefs antérieure (arrêt du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, Rec, EU:T:2000:77, point 480).

50      Or, cette jurisprudence concerne le cas dans lequel, dans la décision finale, la Commission avait infligé des amendes à la fois à des entreprises et à des associations professionnelles, alors que la communication des griefs faisait seulement référence à l’intention de la Commission d’imposer des amendes aux entreprises. Ainsi, les droits de la défense des associations professionnelles concernées avaient été violés en ce que celles‑ci n’avaient pas été invitées, au cours de la procédure administrative, à présenter leurs observations sur l’éventuel exercice du pouvoir de la Commission de leur imposer une amende (arrêt Cimenteries CBR e.a./Commission, point 49 supra, EU:T:2000:77, point 480).

51      En revanche, en l’espèce, le considérant 408 de la communication des griefs de 2006 faisait explicitement état de l’intention de la Commission d’imposer des amendes aux destinataires dudit document, y compris à la requérante. Par conséquent, l’arrêt Cimenteries CBR e.a./Commission, point 49 supra (EU:T:2000:77), a été rendu dans des circonstances factuelles vraiment différentes et n’est donc pas susceptible d’étayer le bien‑fondé des arguments de la requérante.

52      Le même constat doit être effectué en ce qui concerne la prétendue pratique décisionnelle de la Commission, qui inclut trois décisions.

53      En effet, s’agissant de la décision 94/215/CECA de la Commission, du 16 février 1994, réadoptée le 8 novembre 2006 (affaire COMP/38.907 – Poutrelles en acier), l’envoi d’une nouvelle communication des griefs était dû au fait que la communication des griefs antérieure avait été envoyée à TradeArbed SA, alors que l’amende avait, en définitive, été imposée à sa société mère, Arbed SA. Quant à la décision 98/247/CECA de la Commission, du 21 janvier 1998, réadoptée le 20 décembre 2006 (affaire COMP/39.234 – Extra d’alliage, réadoption), l’illégalité consistait en ce que, dans la décision finale, ThyssenKrupp Stainless AG avait été tenue pour responsable de la participation de Thyssen Stahl AG à l’entente, sans que cette imputation ait été anticipée dans la communication des griefs et, partant, sans que ThyssenKrupp Stainless ait pu se défendre à cet égard. En ce qui concerne la décision de la Commission du 20 décembre 2001, réadoptée le 23 juin 2010 (affaire COMP/36.212 – Papier autocopiant), l’illégalité tenait, à l’inverse, au fait que Bolloré SA ne pouvait pas déduire de la communication des griefs antérieure l’intention de la Commission de se fonder sur son implication directe dans l’entente, et non seulement sur celle de sa filiale Copigraph.

54      Ainsi, dans les trois cas, l’envoi d’une nouvelle communication des griefs découlait de ce que la Commission avait décidé de retenir à la charge des entreprises des comportements qui n’étaient pas visés par la communication des griefs antérieure. Tel n’est pas le cas en l’espèce, ce que la requérante ne conteste, par ailleurs, pas.

55      Quant à la communication concernant les bonnes pratiques, les points relatifs au contenu de la communication des griefs en ce qui concerne l’imposition des amendes sont rédigés comme suit :

« 84. La communication des griefs indique clairement si la Commission a l’intention d’infliger des amendes aux entreprises en cause si les griefs devaient être confirmés [article 23 du règlement (CE) no 1/2003]. En pareil cas, la communication des griefs renvoie aux principes applicables énoncés dans les lignes directrices pour le calcul des amendes. Dans la communication des griefs, la Commission précise les principaux éléments de fait et de droit susceptibles d’entraîner l’imposition d’une amende, tels que la durée et la gravité de l’infraction, et indique si cette dernière a été commise intentionnellement ou par négligence. Si tel est le cas, la communication des griefs mentionne aussi de manière suffisamment précise que certains éléments peuvent constituer des circonstances aggravantes et, dans la mesure du possible, elle le fait également pour les circonstances atténuantes.

85.      Bien qu’elle ne soit pas dans l’obligation légale de le faire, afin d’accroître la transparence, la Commission s’efforce d’inclure dans la communication des griefs (en s’appuyant sur les informations dont elle dispose) d’autres éléments utiles pour le calcul ultérieur des amendes, notamment les chiffres des ventes concernées à prendre en compte ainsi que le ou les exercices à prendre en considération pour la valeur de ces ventes. Ces informations peuvent également être communiquées aux parties après la communication des griefs. Dans les deux cas, les parties ont la possibilité de formuler des observations. »

56      Or, d’abord, ainsi que le fait valoir la Commission, le point 7 de la communication concernant les bonnes pratiques dispose explicitement que « [ladite] communication ne crée aucun droit ni [aucune] obligation nouveaux et ne modifie en rien les droits et obligations découlant du traité [FUE], du règlement (CE) no 1/2003, du règlement d’application et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne ». Ainsi, la communication concernant les bonnes pratiques ne saurait, en tout état de cause, pas déroger à la jurisprudence exposée aux points 39 à 41 ci‑dessus.

57      Ensuite, le même constat est d’autant plus valable s’agissant des éléments visés au point 85 de la communication concernant les bonnes pratiques, la Commission ayant explicitement précisé que leur indication dans la communication des griefs ne relevait pas d’une obligation légale et qu’elle pouvait, en tout état de cause, les communiquer aux entreprises concernées à un stade ultérieur.

58      Enfin, les éléments visés au point 84 de la communication concernant les bonnes pratiques correspondent à ceux visés par la jurisprudence exposée aux points 39 à 41 ci‑dessus. Dans ces circonstances, il ressort de l’examen opéré aux points 43 et 44 ci‑dessus que la communication des griefs de 2006 satisfait aux exigences posées au point 84 de la communication concernant les bonnes pratiques.

59      Partant, l’examen de la communication concernant les bonnes pratiques n’étaye pas les allégations de la requérante.

60      Il en est de même s’agissant des déclarations du 14 avril 2011 émanant du membre de la Commission chargé de la concurrence et évoquées par la requérante. En effet, d’une part, de telles déclarations ne sauraient pas lier la Commission lors de l’adoption des décisions imposant des amendes pour la violation des règles du droit de la concurrence. D’autre part, la prise de position dudit membre de la Commission, telle qu’elle est rapportée par la requérante, fait état d’un engagement prospectif d’ordre politique et ne constitue pas l’expression d’une règle de droit obligatoire existante.

61      La requérante fait valoir également que l’erreur ayant justifié l’annulation de la décision de 2007 est une erreur de droit matériel qui a inévitablement affecté la validité des mesures préparatoires de cette décision, ce qui implique, selon elle, qu’une nouvelle communication des griefs était nécessaire.

62      Toutefois, la requérante ne précise pas en quoi les mesures préparatoires de la décision de 2007 ont été viciées par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343).

63      En outre et en tout état de cause, ainsi que cela a déjà été relevé, en substance, aux points 45 et 46 ci‑dessus, les critiques émises par le Tribunal dans l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), ne portaient ni sur l’identification factuelle et l’appréciation juridique de l’infraction commise par la requérante, ni sur la détermination des facteurs à prendre en considération lors de la détermination du montant de l’amende. Le Tribunal a uniquement censuré le choix des données de référence qui devaient servir au calcul détaillé, qui est, par conséquent, la seule mesure préparatoire susceptible d’être viciée par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343). Or, il ressort de la jurisprudence citée aux points 39 à 41 ci‑dessus que ce calcul n’a pas à être effectué dans la communication des griefs, l’indication des facteurs pertinents étant suffisante au regard des droits de la défense des entreprises concernées. Par conséquent, l’argument lié aux mesures préparatoires ne démontre pas non plus qu’une nouvelle communication des griefs était nécessaire en l’espèce.

64      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure, d’abord, que la communication des griefs de 2006 a fourni à la requérante les éléments nécessaires pour qu’elle puisse faire valoir utilement sa défense, y compris en ce qui concerne l’imposition d’une amende, ensuite, que la véracité, la pertinence et le bien‑fondé de ces éléments n’ont pas été affectés par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), et, enfin, que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas retenu d’éléments nouveaux à l’encontre de la requérante, par rapport à ceux indiqués dans la communication des griefs de 2006.

65      Dans ces circonstances, la Commission n’était pas tenue d’envoyer une nouvelle communication des griefs à la requérante, ce qui implique qu’il y a lieu de rejeter la première branche du deuxième moyen.

–       Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée d’une violation du droit d’être entendue de la requérante en ce qui concerne le montant additionnel

66      Par la seconde branche du deuxième moyen, la requérante soutient que ses droits de la défense ont été violés en ce que la lettre de faits ne traitait pas de tous les éléments importants du calcul du montant de l’amende infligée, nonobstant l’obligation de la Commission d’y inclure autant de détails que possible en ce qui concerne la méthodologie de ce calcul.

67      En effet, la lettre de faits n’aurait pas abordé l’intention de la Commission d’imposer un montant additionnel d’amende de 4,65 millions d’euros résultant de l’application du coefficient de dissuasion de la requérante pour la période d’activité de TM T&D, visé au point 20 ci‑dessus (ci‑après le « montant additionnel »).

68      Par conséquent, la requérante soutient qu’elle n’a pas pu présenter ses observations sur l’application du montant additionnel, visée au considérant 78 de la décision attaquée, ce qui implique que la Commission a violé ses droits de la défense.

69      La requérante estime, en outre, que l’imposition du montant additionnel, en plus de l’amende infligée à TM T&D, est erronée.

70      La Commission conteste le bien‑fondé des arguments de la requérante.

71      En ce qui concerne le grief tiré d’une violation des droits de la défense, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, leur respect exige que la personne intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances allégués ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction au traité (arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec, EU:C:2004:6, point 66).

72      En outre, il a déjà été rappelé au point 40 ci‑dessus que, dès lors que la Commission indique expressément, dans la communication des griefs, qu’elle va examiner s’il convient d’infliger des amendes aux entreprises concernées et qu’elle énonce les principaux éléments de fait et de droit susceptibles d’entraîner une amende, elle remplit son obligation de respecter le droit des entreprises à être entendues, dès lors qu’elle leur donne les éléments nécessaires pour se défendre non seulement contre une constatation de l’infraction, mais également contre le fait de se voir infliger une amende (voir arrêt BASF/Commission, point 39 supra, EU:T:2006:74, point 48 et jurisprudence citée).

73      En l’espèce, il ressort explicitement du considérant 78 de la décision attaquée que le montant additionnel vise à assurer l’effet dissuasif de l’amende imposée à la requérante. Or, ainsi que cela a été constaté au point 43 ci‑dessus, la volonté d’assurer l’effet dissuasif de l’amende a été évoquée, de manière adéquate, au point 9.2 de la communication des griefs de 2006, qui peut être prise en considération en l’espèce (voir point 42 ci‑dessus). Par conséquent, les exigences posées par la jurisprudence rappelée aux points 40 et 72 ci‑dessus ont été respectées par la Commission en ce qui concerne le montant additionnel.

74      Ce constat est toutefois sans préjudice de ce que, à la suite de l’envoi de la communication des griefs, la Commission était tenue, en vertu de la jurisprudence citée au point 71 ci‑dessus, de fournir à la requérante des éléments supplémentaires s’agissant des modalités de mise en œuvre de son intention d’assurer l’effet dissuasif de l’amende, afin de lui permettre de faire valoir utilement son point de vue à cet égard, y compris en ce qui concerne l’imposition du montant additionnel.

75      Cependant, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, dans la mesure où la lettre de faits n’a pas de statut procédural particulier, il n’est pas nécessaire que les éléments en question aient été explicités par la Commission précisément dans ce document. Il importe plutôt de vérifier si, au regard du déroulement de l’ensemble de la procédure ayant abouti à l’adoption de la décision attaquée, la requérante a été mise en mesure, de manière adéquate, de comprendre cette intention et d’y répondre.

76      Premièrement, à cet égard, il convient de relever que des éléments pertinents dans ce contexte ressortent de la décision de 2007. En effet, le considérant 491 de cette décision détermine le coefficient de dissuasion applicable à la requérante, tandis que son considérant 503 prévoit explicitement, contrairement à ce qu’a soutenu la requérante lors de l’audience, qu’un montant additionnel, calculé sur le fondement de ce même coefficient, sera imposé à la requérante pour la période d’activité de TM T&D. Au vu de ces considérants, la requérante était donc en mesure de comprendre que la Commission entendait assurer l’effet dissuasif de l’amende également en ce qui concerne la période d’activité de TM T&D.

77      Deuxièmement, rien dans l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), ne permet de considérer que le choix de la Commission d’assurer l’effet dissuasif de l’amende imposée à la requérante également en ce qui concerne la période d’activité de TM T&D serait illégal ou inapproprié, dès lors que cet arrêt ne traite pas de cette question.

78      Troisièmement, au point 20 de la lettre de faits, la Commission a exposé que, dans la nouvelle décision à adopter à la suite de l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), elle n’allait pas retenir de nouveaux griefs à l’encontre de la requérante et que le calcul de la nouvelle amende allait être fondé sur l’appréciation des faits opérée dans la décision de 2007, tout en respectant les principes posés dans l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), et l’arrêt du 12 juillet 2011, Mitsubishi Electric/Commission (T‑133/07, Rec, EU:T:2011:345). Aux points 22, 31 et 32 de la lettre de faits, la Commission a rappelé son intention de fixer le montant de l’amende à un niveau suffisamment élevé pour assurer son effet dissuasif et a précisé que son appréciation à cet égard allait être fondée sur le chiffre d’affaires total de la requérante et de Melco. Aux points 21 et 41 de la lettre de faits, la Commission a invité la requérante et Melco à présenter leurs observations, en particulier en ce qui concerne la méthode de calcul et les paramètres pertinents, et leur a fixé un délai à cet égard.

79      Ainsi, à la lecture de la lettre de faits, la requérante était en mesure de comprendre, d’une part, que, pour autant que les paramètres de calcul du montant de l’amende imposée par la décision de 2007 fussent compatibles avec l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), ils allaient être repris dans la décision à adopter et, d’autre part, que ces paramètres incluaient la volonté d’assurer un effet dissuasif de l’amende. Or, dans la mesure où cette même volonté avait amené la Commission, dans la décision de 2007, à imposer à la requérante un montant additionnel pour la période d’activité de TM T&D, la requérante était en mesure de comprendre qu’un montant additionnel analogue pouvait lui être imposé par la Commission dans la décision attaquée.

80      La requérante soutient, à cet égard, que la lettre de faits ne s’est pas référée, en ses points 31 et 32, à la décision de 2007 en ce qui concerne l’imposition du montant additionnel, alors qu’elle l’a fait pour d’autres aspects du calcul du montant de l’amende, notamment en ses points 26 et 39.

81      Sans qu’il soit nécessaire d’aborder la recevabilité de cet argument, contestée par la Commission, il suffit de remarquer que, ainsi que cela a été observé aux points 78 et 79 ci‑dessus, la circonstance selon laquelle la décision à adopter allait être fondée, dans la mesure du possible, sur les paramètres retenus dans la décision de 2007 ressortait clairement de la lettre de faits, et notamment de son point 20, nonobstant l’absence de référence explicite à la décision de 2007 aux points 31 et 32 de ladite lettre.

82      Quatrièmement, aux points 21 et 22 de ses observations sur la lettre de faits, la requérante s’est référée au coefficient de dissuasion qui devait lui être appliqué, sans s’interroger sur la période par rapport à laquelle il devait être appliqué. Ainsi, les observations de la requérante sur la lettre de faits ne font pas état d’incertitudes quant à la détermination de cette période.

83      Cinquièmement, les parties sont en désaccord quant à la question de savoir si l’application du coefficient de dissuasion pour la période d’activité de TM T&D a été évoquée lors de la réunion du 12 juin 2012. La Commission soutient que tel a été le cas, en s’appuyant sur le procès‑verbal interne qu’elle a établi pour cette réunion. La requérante s’oppose à l’interprétation de la Commission, se référant au résumé préparé par ses avocats à l’issue de ladite réunion, présenté en annexe à sa lettre du 15 avril 2015.

84      À cet égard, il y a lieu de relever que, si le procès‑verbal interne de la Commission contient, sous le deuxième tiret figurant à sa troisième page, un passage qui pourrait, éventuellement, être interprété comme se référant à l’application du coefficient de dissuasion pour la période d’activité de TM T&D, ce passage n’a pas été rédigé de manière suffisamment claire, comme l’a admis la Commission elle‑même, ce qui implique qu’il ne peut pas être pris en considération par le Tribunal.

85      Cela étant, il ressort explicitement tant des autres parties du procès‑verbal interne de la Commission, rédigées d’une manière claire et précise, que du résumé préparé par les avocats de la requérante, qui peut être pris en considération en ce qu’il constitue une réaction aux allégations de la Commission formulées en réponse aux questions posées par le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 14 avril 2005, Gaki‑Kakouri/Cour de justice, C‑243/04 P, EU:C:2005:238, point 32), que, de l’avis de la Commission, il n’y avait pas lieu de changer les paramètres de calcul du montant de l’amende retenus dans la décision de 2007 qui n’avaient pas été critiqués par le Tribunal et que l’unique modification de la méthodologie devait, par conséquent, concerner l’année de référence. Or, ainsi que cela a été constaté aux points 76 et 77 ci‑dessus, le coefficient de dissuasion a été appliqué par la Commission à la période d’activité de TM T&D dans la décision de 2007, sans que cet élément du calcul du montant de l’amende ait été critiqué par la suite par le Tribunal.

86      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que la position exprimée par la Commission lors de la réunion du 12 juin 2012, telle qu’elle est reflétée tant dans son procès‑verbal interne que dans le résumé préparé par les avocats de la requérante, corroborait les autres éléments pertinents dont il ressortait qu’elle entendait appliquer le coefficient de dissuasion à la période d’activité de TM T&D et, partant, d’imposer à la requérante le montant additionnel.

87      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que, dès la communication des griefs de 2006, la requérante était au courant que la Commission entendait assurer l’effet dissuasif de l’amende imposée. À tout le moins dès la décision de 2007, elle était en mesure de comprendre que cette intention impliquait l’imposition d’un montant additionnel pour la période d’activité de TM T&D. Cette intention n’a pas été mise en cause par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), et a été réaffirmée tant dans la lettre de faits que lors de la réunion du 12 juin 2012.

88      Dans ces circonstances, les arguments de la requérante ne permettent pas d’établir que ses droits de la défense auraient été violés en ce qui concerne l’intention de la Commission de lui imposer le montant additionnel. Dès lors, il y a lieu de rejeter la seconde branche pour autant qu’elle est tirée d’une violation desdits droits.

89      Pour autant que la requérante soutienne, en outre, que l’imposition du montant additionnel procède d’une erreur, il y a lieu de relever que son argument est inopérant dans le cadre du présent moyen, en ce qu’il ne tend pas à établir une violation de ses droits de la défense.

90      Par ailleurs, en tout état de cause, à cet égard, la requérante se borne à relever que, dans la mesure où la décision attaquée a imposé des amendes différentes « pour Toshiba » et « pour TM T&D », le montant additionnel ne pouvait pas être imposé en plus de la seconde amende, étant donné que TM T&D était distincte de ses actionnaires et que son chiffre d’affaires n’était pas suffisamment important pour justifier l’application d’un coefficient de dissuasion. Or, cet argument repose sur une prémisse erronée, dès lors que la décision attaquée n’a pas imposé d’amendes distinctes « pour la requérante » et « pour TM T&D », mais une amende unique à la requérante pour sa participation à l’infraction. Au demeurant, le fait qu’une partie de l’amende imposée à la requérante correspond à la période d’activité de TM T&D n’implique nullement que cette même partie de l’amende ne puisse pas être augmentée par le montant additionnel afin d’assurer un effet dissuasif à l’égard de la requérante, qui a été tenue pour responsable de l’infraction commise par TM T&D.

91      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la seconde branche du deuxième moyen et, par voie de conséquence, ce moyen dans son intégralité.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

92      Par le quatrième moyen, la requérante soutient que la Commission n’a pas motivé à suffisance de droit le montant de départ de TM T&D, utilisé dans la décision attaquée pour calculer le montant de départ de l’amende de la requérante, l’amende correspondant à la période d’activité de TM T&D, ainsi que le montant additionnel. La requérante précise, à cet égard, que le fondement sur lequel la Commission a calculé un montant de départ de 31 000 000 euros pour TM T&D n’a pas été expliqué dans la décision de 2007 et que la décision attaquée reprend ce même montant sans qu’une explication supplémentaire ait été fournie. Par conséquent, en déterminant le montant de départ de TM T&D, la Commission aurait agi arbitrairement et violé l’obligation de motivation.

93      La Commission conteste le bien‑fondé des arguments de la requérante.

94      Selon la jurisprudence, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge de l’Union d’exercer son contrôle (voir, par analogie, arrêt du 18 septembre 2003, Volkswagen/Commission, C‑338/00 P, Rec, EU:C:2003:473, point 124 et jurisprudence citée). Si, en vertu de l’article 296 TFUE, la Commission est tenue de mentionner les éléments de fait et de droit dont dépend la justification de la décision et les considérations juridiques qui l’ont amenée à prendre celle‑ci, cette disposition n’exige pas qu’elle discute tous les points de fait et de droit qui auraient été traités au cours de la procédure administrative (voir, par analogie, arrêt Volkswagen/Commission, précité, EU:C:2003:473, point 127 et jurisprudence citée). L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications (voir arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec, EU:C:1998:154, point 63 et jurisprudence citée). La jurisprudence qui précède est applicable, par analogie, aux décisions de la Commission constatant une infraction à l’article 53, paragraphe 1, de l’accord sur l’Espace économique européen.

95      Dans ce contexte, il convient de rappeler que la décision attaquée prévoit explicitement qu’elle constitue une décision modificative de la décision de 2007, en ce qui concerne les amendes imposées à la requérante et à Melco. Dans ces circonstances, la motivation de la décision de 2007, pour autant qu’elle n’a pas été affectée par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), et qu’elle n’est pas contredite par le libellé de la décision attaquée, peut être prise en compte lors de l’examen du présent moyen.

96      À cet égard, aux considérants 57 à 61 de la décision attaquée, la Commission a considéré que, l’infraction concernée étant très grave, il y avait lieu d’appliquer un traitement différencié afin de refléter la capacité inégale des différentes entreprises à causer un préjudice significatif à la concurrence. Elle a estimé que ce traitement différencié devait prendre la forme d’une catégorisation des montants de départ en fonction des chiffres d’affaires mondiaux relatifs aux AIG pour l’année 2003, fournis par les différentes entreprises ayant participé à l’infraction. En renvoyant à la catégorisation établie aux considérants 484 à 488 de la décision de 2007, la Commission a relevé, au considérant 61 de la décision attaquée, que le chiffre d’affaires mondial de TM T&D pour les AIG la plaçait dans la deuxième catégorie, ce qui impliquait que son montant hypothétique de départ était de 31 000 000 euros.

97      Le considérant 483 de la décision de 2007 précise en outre que les catégories ont été établies de façon à ce que les différences entre les parts de marché des AIG des entreprises dans une même catégorie soient moins importantes que les différences par rapport aux parts de marché des entreprises placées dans des catégories différentes.

98      Dans ce contexte, il ressort par ailleurs du point 1 A des lignes directrices pour le calcul des amendes que, en ce qui concerne les infractions très graves, le montant de départ envisageable était supérieur à 20 000 000 euros.

99      Or, ces éléments sont de nature à permettre à la requérante de comprendre les éléments d’appréciation qui ont permis à la Commission de mesurer la gravité de l’infraction commise par elle, ce qui implique que la Commission a respecté l’obligation de motivation lui incombant et qu’elle n’était notamment pas tenue de faire figurer dans la décision attaquée un exposé plus détaillé ou des éléments chiffrés relatifs à la détermination exacte du montant de départ de TM T&D (voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec, EU:T:2004:118, point 252).

100    En outre, même si la Commission n’indique pas dans la décision attaquée pour quelles raisons elle a choisi le chiffre précis de 31 000 000 euros pour les entreprises classées dans la deuxième catégorie, dont TM T&D, ce choix ne saurait être qualifié d’arbitraire et ne dépasse pas les limites du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose en la matière (voir, par analogie, arrêt Tokai Carbon e.a./Commission, point 99 supra, EU:T:2004:118, point 224), dès lors qu’il est encadré par les éléments rappelés aux points 96 à 98 ci‑dessus.

101    Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne le montant de départ de l’amende

102    Par le troisième moyen, la requérante soutient que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement en calculant l’amende qui lui a été infligée sur le fondement du montant de départ de TM T&D, et non pas sur le fondement du chiffre d’affaires de cette dernière.

103    La requérante prétend, à cet égard, que, plutôt que de déterminer un montant hypothétique de départ pour TM T&D et de le répartir entre elle‑même et Melco, la Commission aurait dû, d’abord, répartir entre elles deux le chiffre d’affaires de TM T&D pour 2003, ensuite, calculer leurs parts du marché mondial en 2003 sur le fondement de leurs parts respectives du chiffre d’affaires de TM T&D et, enfin, les classer dans le groupe de montants de départ approprié, déterminé dans la décision de 2007 en fonction des parts du marché mondial. La requérante soutient qu’elle aurait ainsi été traitée de la même manière que les producteurs européens.

104    La requérante étaye sa position par quatre séries d’arguments.

105    Premièrement, elle invoque la décision de 2007, l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), ainsi que certains passages de la décision attaquée, dont il ressortirait que la détermination du montant des amendes devait être fondée sur la valeur des ventes d’AIG en 2003.

106    Deuxièmement, la requérante invoque plusieurs arguments visant, en substance, une prétendue incohérence entre le choix de déterminer un montant de départ pour TM T&D et le fait que les amendes ont été imposées à la requérante elle‑même.

107    Troisièmement, la requérante critique le constat de la Commission figurant au considérant 66 de la décision attaquée selon lequel la méthode qu’elle a proposée aurait eu pour conséquence d’avoir recours à son chiffre d’affaires virtuel de 2001.

108    Quatrièmement, selon la requérante, la Commission aurait refusé de suivre la méthode qu’elle proposait sans fournir de motivation appropriée et, notamment, sans indiquer de raisons pour lesquelles ladite méthode aurait été incorrecte ou inappropriée.

109    La Commission conteste le bien‑fondé des arguments de la requérante.

110    À titre liminaire, il convient de rappeler que la Commission dispose d’une marge d’appréciation dans la fixation du montant des amendes afin d’orienter le comportement des entreprises dans le sens du respect des règles de concurrence (voir arrêt Tokai Carbon e.a./Commission, point 99 supra, EU:T:2004:118, point 216 et jurisprudence citée).

111    Le montant de l’amende est fixé par la Commission en fonction de la gravité de l’infraction et, s’il y a lieu, de sa durée. La gravité de l’infraction doit être établie en fonction de critères tels que les circonstances particulières de l’affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes. Des éléments objectifs tels que le contenu et la durée des comportements anticoncurrentiels, leur nombre et leur intensité, l’étendue du marché affecté et la détérioration subie par l’ordre public économique doivent être pris en compte. L’analyse doit également prendre en considération l’importance relative et la part de marché des entreprises responsables ainsi qu’une éventuelle récidive (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 71 supra, EU:C:2004:6, points 89 à 91).

112    Toutefois, à chaque fois que la Commission décide d’imposer des amendes en vertu du droit de la concurrence, elle est tenue de respecter les principes généraux de droit, parmi lesquels figure le principe d’égalité de traitement, tel qu’il est interprété par les juridictions de l’Union (arrêt du 27 septembre 2006, Archer Daniels Midland/Commission, T‑59/02, Rec, EU:T:2006:272, point 315). Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement ou de non‑discrimination exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 14 mai 1998, BPB de Eendracht/Commission, T‑311/94, Rec, EU:T:1998:93, point 309 et jurisprudence citée).

113    En l’espèce, il y a lieu de relever, à titre liminaire, que la requérante ne conteste pas que, pendant l’année de référence, à savoir 2003, elle n’avait pas enregistré elle‑même de ventes d’AIG, étant donné qu’elle avait transféré ses activités dans ce secteur à TM T&D en 2002.

114    Cette circonstance implique que l’amende de la requérante ne pouvait pas être calculée exactement de la même manière que celle des destinataires européens de la décision de 2007 et que, sur ce point, sa situation n’était donc pas comparable à celle de ces derniers.

115    Dans ces circonstances, c’est à juste titre que la Commission a choisi de déterminer un montant hypothétique de départ pour TM T&D et de le répartir entre ses actionnaires, plutôt que de répartir les ventes mondiales d’AIG de TM T&D entre ses actionnaires et de déterminer leurs montants de départ individuels sur la base de leurs parts respectives dans lesdites ventes.

116    En effet, ainsi qu’il ressort du considérant 2 de la décision attaquée et du considérant 61 de la décision de 2007, TM T&D était une entreprise commune à part entière responsable de la production et de la vente des AIG. Ainsi, TM T&D constituait une entité distincte de ses actionnaires, quoique contrôlée par eux conjointement.

117    Cette circonstance ressort par ailleurs du point 7.2.7 de la décision de 2007, consacré à la détermination de ses destinataires. En effet, aux considérants 407 et 435 de ladite décision, la requérante et Melco ont été explicitement tenues pour responsables, en tant qu’actionnaires, de l’« infraction commise par TM T&D entre le 1er octobre 2002 et le 11 mai 2004 ».

118    Les arguments de la requérante ne sont pas susceptibles de remettre en cause cette conclusion.

119    En effet, par sa première série d’arguments, évoquée au point 105 ci‑dessus, la requérante soutient qu’il ressort de la décision de 2007, de l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), et des considérants 59, 60, 62 et 66 de la décision attaquée que la détermination du montant des amendes aurait dû être fondée sur la valeur des ventes d’AIG individuelles d’elle‑même et de Melco en 2003.

120    Or, il ressort des considérants 59 et 60 de la décision attaquée, en substance, que, dans le cas de la requérante, la règle générale suivie dans la décision de 2007 et sur laquelle le Tribunal a insisté dans l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), à savoir l’utilisation de l’année 2003 en tant qu’année de référence pour la détermination de la valeur des ventes, doit être appliquée selon des modalités particulières, étant donné que, pendant ladite année, la requérante n’a pas enregistré elle‑même de ventes d’AIG, compte tenu du fait qu’elle avait transféré ses activités dans ce secteur à TM T&D.

121    Cette interprétation est confirmée tant par les considérants 62 et 66 de la décision attaquée que par l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), dans lequel le Tribunal a explicitement évoqué la méthode suivie par la Commission dans la décision attaquée en tant qu’exemple approprié.

122    S’agissant de la deuxième série d’arguments, évoquée au point 106 ci‑dessus, la requérante soutient que la Commission se réfère à tort à la « part de TM T&D dans l’infraction », étant donné qu’il revenait à la Commission de déterminer non pas l’amende de TM T&D, mais celle de ses sociétés mères. Dans ce contexte, le chiffre d’affaires de TM T&D constituerait la somme des chiffres d’affaires de la requérante et de Melco en ce qui concerne les AIG.

123    Or, d’abord, ainsi qu’il ressort du point 117 ci‑dessus, le fait que la Commission se soit référée à l’infraction commise par TM T&D est pleinement cohérent avec les constats opérés dans la décision de 2007.

124    Ensuite, en raison de la position de TM T&D en tant qu’entité distincte, c’est à tort que la requérante prétend que le chiffre d’affaires de TM T&D constituerait simplement la somme des chiffres d’affaires de ses actionnaires en ce qui concerne les AIG.

125    Enfin, plus généralement, le fait que les amendes imposées dans la décision attaquée l’ont été uniquement à la requérante et à Melco, compte tenu de la dissolution de TM T&D en 2005, ne saurait avoir pour conséquence que la Commission serait tenue de scinder artificiellement le chiffre d’affaires de cette dernière, en méconnaissance du fait qu’elle était active sur le marché pendant l’année de référence en tant qu’opérateur distinct de ses actionnaires. En effet, une telle approche reviendrait effectivement à s’écarter de l’intention affichée par la Commission de se fonder sur les chiffres d’affaires réalisés pendant ladite année lors de la détermination du montant des amendes.

126    Dans le cadre de la troisième série d’arguments, rappelée au point 107 ci‑dessus, la requérante conteste que le recours à la méthode suggérée par elle aurait pour conséquence d’avoir recours à des « chiffres d’affaires virtuels pour 2001 ». Elle précise qu’elle avait un chiffre d’affaires réel en 2001 et que, en tout état de cause, il ne revenait pas à la Commission de calculer son chiffre d’affaires virtuel pour 2001, mais pour 2003, puis de le comparer avec les chiffres d’affaires réels d’autres participants à l’infraction.

127    À cet égard, il y a lieu d’admettre que le sens de la cinquième phrase du considérant 66 de la décision attaquée, selon laquelle la méthode suggérée par les requérantes « serait inappropriée en ce qu’elle impliquerait la comparaison des chiffres d’affaires virtuels pour 2001 de Melco et [de] Toshiba avec les chiffres d’affaires pour 2003 des autres entreprises », n’est pas entièrement clair, dès lors, notamment, que la Commission n’a pas défini la notion de « chiffre d’affaires virtuel pour 2001 ».

128    Cela étant, aux troisième et quatrième phrases du considérant 66 de la décision attaquée, la Commission a expliqué que la méthode proposée par la requérante ne permettrait pas de refléter le poids de TM T&D, en tant qu’entité ayant participé à l’infraction en 2003, au sein de cette dernière. Ainsi, lue dans le contexte des phrases qui la précèdent immédiatement, la cinquième phrase du même considérant 66 exprime que, de l’avis de la Commission, la méthode proposée par la requérante aurait pour conséquence de scinder artificiellement le chiffre d’affaires de TM T&D, nonobstant sa qualité d’entité distincte de ses actionnaires, pour déterminer des chiffres d’affaires virtuels de ces derniers. Or, ainsi qu’il ressort des points 115 à 117 et 123 à 125 ci‑dessus, ce constat de la Commission est fondé.

129    Par la quatrième série d’arguments, résumée au point 108 ci‑dessus, la requérante se plaint de ce que la Commission n’aurait pas motivé son rejet de la méthode proposée par elle et n’aurait notamment pas indiqué de raisons pour lesquelles cette méthode aurait été incorrecte ou inappropriée.

130    Or, d’une part, le présent moyen ne visant pas une violation de l’obligation de motivation, l’allégation de la requérante est inopérante dans son contexte.

131    D’autre part, en tout état de cause, ladite allégation manque manifestement en fait. En effet, ainsi que cela vient d’être exposé aux points 127 et 128 ci‑dessus, la Commission a indiqué au considérant 66 de la décision attaquée les motifs pour lesquels elle considérait inappropriée la méthode proposée par la requérante.

132    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le troisième moyen.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne la détermination du niveau de responsabilité de la requérante par rapport aux producteurs européens

133    La requérante soutient que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement lorsqu’elle n’a pas pris en considération, lors de la fixation du montant de départ des amendes, son niveau de responsabilité moins important par rapport aux producteurs européens. Elle explique, à cet égard, dans la requête, que, alors que les participants européens à l’infraction ont participé à deux infractions, à savoir l’arrangement commun et l’attribution des projets relatifs à des AIG dans l’EEE, les participants japonais, dont elle‑même, étaient seulement impliqués dans l’arrangement commun.

134    La requérante poursuit que, selon la jurisprudence, le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente doit être pris en considération lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et de la détermination du montant de l’amende. Or, dans le cadre de l’application des lignes directrices pour le calcul des amendes, cette appréciation devrait nécessairement se faire au stade de la fixation du montant de départ, étant donné qu’une entreprise qui a participé seulement à un aspect d’une entente a commis une infraction moins grave que celle qui a participé à plusieurs aspects de la même entente.

135    Dans la réplique, la requérante précise, en réponse aux arguments de la Commission, que le cinquième moyen ne concerne ni la notion d’infraction unique et continue ni la gravité de son comportement, visée au point 260 de l’arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra (EU:T:2011:343), mais sa contribution à l’entente, qui doit être prise en considération lors de la fixation du montant de l’amende.

136    La Commission conteste le bien‑fondé des arguments de la requérante. Elle expose, en particulier, que l’infraction constatée par la décision de 2007 était une infraction unique et continue et que la participation à cette infraction des entreprises japonaises, dont la requérante, n’était pas moins grave que celle des entreprises européennes.

137    Selon la jurisprudence, pour autant qu’une infraction a été commise par plusieurs entreprises, il y a lieu d’examiner la gravité relative de la participation de chacune d’entre elles (voir arrêt du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec, EU:C:1999:356, point 150 et jurisprudence citée). Ainsi, le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé doit être pris en considération lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et de la détermination du montant de l’amende (arrêt Commission/Anic Partecipazioni, précité, EU:C:1999:356, point 90).

138    En l’espèce, en premier lieu, il a déjà été rappelé aux points 2 à 4 ci‑dessus que, dans la décision de 2007, la Commission avait constaté l’existence d’une infraction unique et continue englobant l’arrangement commun, l’accord GQ et l’accord EQ. Ainsi, la requérante prétend à tort que les entreprises européennes ont participé à deux infractions, tandis qu’elle‑même n’a participé qu’à une seule infraction.

139    En second lieu, contrairement à ce que prétend la requérante, sa contribution à l’infraction n’est pas moindre du fait qu’elle n’a pas participé à l’attribution des projets relatifs à des AIG dans l’EEE, régie par l’accord EQ.

140    À cet égard, il est, certes, vrai que la participation des producteurs japonais et celle des producteurs européens aux accords et aux pratiques concertées constatés dans la décision de 2007 et visant l’EEE n’étaient pas de même nature. En effet, les entreprises japonaises, dont la requérante, se sont engagées, dans le cadre de l’arrangement commun, à ne pas pénétrer le marché de l’EEE et leur participation consistait donc en une omission d’agir. Les entreprises européennes, quant à elles, se sont réparti les différents projets relatifs à des AIG sur ce même marché, par le biais d’actes collusoires positifs (voir, en ce sens, arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra, EU:T:2011:343, point 260).

141    Toutefois, il y a lieu de relever que l’omission d’agir des entreprises japonaises, dont la requérante, était une condition préalable à ce que l’attribution des projets relatifs à des AIG dans l’EEE puisse être effectuée entre les producteurs européens selon les règles convenues à cet effet (voir, en ce sens, arrêt Toshiba/Commission, point 8 supra, EU:T:2011:343, point 261). Ainsi, en respectant leurs engagements en vertu de l’arrangement commun, les entreprises japonaises apportaient une contribution nécessaire au fonctionnement de l’infraction dans son ensemble.

142    Par conséquent, il y a lieu de conclure que la contribution de la requérante à l’infraction est comparable à celle des entreprises européennes, ce qui implique que la Commission n’a pas violé le principe d’égalité de traitement.

143    Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

144    Tous les moyens invoqués au soutien de la demande principale étant rejetés, il y a lieu de la rejeter dans son ensemble.

 Sur la demande subsidiaire, tendant à la réduction du montant de l’amende

145    La requérante demande au Tribunal de réduire le montant de l’amende qui lui a été imposée dans la décision attaquée. Elle se réfère, à cet égard, à un calcul de remplacement qu’elle a présenté en annexe à la requête.

146    La Commission conteste la recevabilité de la présente demande en faisant valoir qu’elle n’est pas étayée par un quelconque moyen.

147    Sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la fin de non‑recevoir invoquée par la Commission, il y a lieu de relever que le calcul de remplacement présenté par la requérante n’est pas étayé par des arguments autres que ceux examinés dans le cadre de la demande principale et qu’il consiste, pour l’essentiel, à mettre en œuvre la méthodologie que la requérante a défendue dans le cadre du troisième moyen. Dès lors, eu égard aux considérations qui précèdent et en l’absence d’autres éléments en l’espèce de nature à conduire à la réduction du montant de l’amende qui a été infligée à la requérante, il n’y a pas lieu, dans l’exercice du pouvoir de pleine juridiction du Tribunal, de faire droit à sa demande subsidiaire.

148    Il convient, par conséquent, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

149    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Toshiba Corp. est condamnée aux dépens.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 janvier 2016.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la demande principale, tendant à l’annulation de la décision attaquée

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense de la requérante

– Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de l’absence de nouvelle communication des griefs

– Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée d’une violation du droit d’être entendue de la requérante en ce qui concerne le montant additionnel

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne le montant de départ de l’amende

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qui concerne la détermination du niveau de responsabilité de la requérante par rapport aux producteurs européens

Sur la demande subsidiaire, tendant à la réduction du montant de l’amende

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.